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Du haut de la rue Moncade, on aperçoit au nord la chaussée de Dax avec la colline de Laqueyre et plus loin, à l’horizon les crêtes de pins qui dessinent les contours des terres landaises.

A gauche, les collines de Saint-Jean, des Soarns, Balansun puis la vallée du gave, et derrière, le promontoire de Castetner ; puis au-delà la chaîne des Pyrénées avec comme points remarquables les Pics d’Ossau, d’Annie et d’Ory, ensuite l’horizon semble disparaître en un fondu enchaîné vers la jointure de l’Espagne et de l’Océan.

En descendant vers la ville, me reviennent des souvenirs d’enfance : nous sommes au début des années soixante, je prend le chemin de l'école en tablier gris, le cartable de cuir à la main. Notre maison, est face à l’entrée de la Tour Moncade, je descends la rue vers le centre-ville que l’on aperçoit, tout en bas.

De suite à ma gauche, le café Lacoste, dont s’échappent des effluves de vins et de bois, mêlés de murmures et d'exclamations. Le père Tauzia sur sa chaise, est devant la porte, à l’intérieur, dans la salle obscure, des vieux jouent aux cartes, le paquet de gris sur la table. Un peu plus bas la maison des Florès à droite et des Bordenave, en face, des rires, des disputes aussi, des cris d’enfants dans la rue, aux fenêtres ..

En descendant au croisement de la rue Mimonce et de la rue des Remparts sur le côté droit c’est la boulangerie Morlanne, je sens cette odeur de pain chaud, la camionnette est devant la porte avec le père Morlanne qui charge sa fournée pour la tournée quotidienne.

Nous voilà au collège Moncade, du réfectoire qui donne sur la rue, on entend en bruit de fond le murmure du déjeuner matinal, comme un flot continu, qui sort des fenêtres et m'accompagne un moment, jusqu’en bas de la rue au croisement de la rue des Capucins. Juste à cet endroit à droite voilà l’épicerie Joseph, avec les cageots de fruits et légumes sur l’étal, bien calés devant la vitrine et sur lesquels on chaparde les élastiques pour faire des chiques.

A l’intérieur l’épicier Joseph Darieu, grand, mince, avec des lunettes en cul de bouteille et sa femme, petite avec une voix douce. Sur la droite dans le magasin un étal vitré avec des bacs remplis de carambars, têtes de nègres et autres malabars ; et puis ces odeurs de café de fromage, de charcuterie, odeurs d’épicerie de notre enfance.

On s’enfonce encore en se rapprochant du centre-ville, la rue Moncade se termine en passant devant l'échoppe obscure du cordonnier François, qui accueille ses clients depuis la fenêtre, grande ouverte sur le trottoir.

A gauche, à l’angle de la rue Moncade, et de la rue du commerce, c’est la quincaillerie Mesplède. Grand magasin avec des comptoirs en bois vitrés remplis de trésors : couteaux de poches, ustensiles de cuisine,  outillages de toute sortes, peintures, outillage de jardin, une vraie caverne d’Ali Baba et du personnel derrière les comptoirs qui vont et viennent dans un balai incessant devant les clients qui discutent entre eux…

En face à droite la droguerie Belhomme occupe l’autre angle de la rue.

En continuant nous voici dans la rue de l’Horloge, à gauche la Pharmacie Théodoly et à l’opposé, le magasin d'électro-ménager Guardiola, ancien magasin « Ville de Madrid » avec sa façade en petits carreaux de mosaïque bleu. En suivant à gauche le photographe Cathalaa avec des photos de mariages en vitrines et le père Cathalaa, grand, distingué et discret, est devant sa porte en train de retoucher un portrait.

Puis l’imprimerie Moulia Frères, l’armurerie Vignau, les Chaussures Sarraute et plus loin, sur la droite le marchand de pêche Siberchicot, un type hirsute mal peigné et dépenaillé, avec un air ahuri semblant toujours sortir du lit. Vieux garçon qui vit là avec sa mère.

Dans la boutique, c’est un vrai capharnaüm :

Un comptoir en bois, avec un chat qui dort ; à coté une lessiveuse avec de la sciure humide remplie d’asticots pour les appâts et d’où s’échappe une odeur tenace. Des présentoirs vitrés avec des montures de pêche, des boites de plombs, de hameçons, des bouchons ; derrière le comptoir, des étagères brinquebalantes où s’entassent divers objets : boites de moulinets, de cartouches et aussi des paquets de pâtes, de farines, pelotes de laine ; dans un coin un amas de cannes à pêche et d’épuisettes, dans un autre des bottes et habits de pêche et chasse, et au milieu de ce bric-à-brac, notre personnage, l’air ahuri, et ravi, en train de casser la croute.

Juste à côté, en suivant, la boutique des sœurs Gabriel ; qui exercent la même activité que leur distingué voisin : articles de pêche et produits divers, mieux tenue, mais tout aussi pittoresque.

Bien entendu les relations de voisinage ne sont pas au mieux, les propriétaires s’ignorent très ostensiblement ce qui accentue le cocasse de la situation.

Me voici au bout de la rue au carrefour avec la rue Jeanne d'Albret et en continuant tout droit la rue du Bourg-Vieux. Sur ma gauche la pharmacie Darrigrand à droite la boutique de meuble Mazerolles. Je traverse la rue je passe devant l'alimentation Lugat et en face la petite charcuterie des frères Peyré, avec des cuisses de confit en vitrine. Je pénètre par la rue Roarie, dans le patio de la maison de Jeanne d'Albret. Je vais voir le perroquet Jacquot qui est sur son perchoir et qui fait son cabotin. Mr Bérot, le propriétaire, avec son béret sur la tête m'accueille avec le sourire et me dit de ne pas trop traîner pour ne pas être en retard à l'école.

Boulevard de la Moutète, je passe devant l'échoppe de Castaing le coiffeur, dans sa petite tour qui semble garder le jardin de la maison de Jeanne d'Albret et ensuite Despuyoos le sandalier et le restaurant Campagne où j'aperçois en passant, assis autour d'une table les instituteurs Raymond Flous, Pierre Cazaubon et Henri Touyaa, qui prennent leur café, bien corsés, en fumant la cigarette.

Me voici à l'école, je retrouve mes camarades dans la grande cour de récréation avec ses grands platanes aux pieds desquels on joue aux "clot" avec des billes, dans le creux des racines ; le panneau de basket sur le coté de la cour et le préau à droite avec son mur où on joue à la pelote.

La sonnerie retentit et chacun s'égaille dans la cour pour rejoindre sa classe.

 

Janvier 2021

 

Tag(s) : #Années 60, #Ecole, #Orthez, #Jacques Lagrave
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